Faire découvrir et lire les écrivains congolais de la postindépendance (05/02/2016)

 

Tel est le projet de l’ouvrage de Lete Apey Esobe, une série d’entretiens consacrés à quatorze écrivains de la République Démocratique du Congo. Paru aux éditions Odem, en 2011, l’ouvrage, riche en références, offre un survol, en 180 pages, non seulement de la littérature congolaise, mais aussi de celle africaine, voire mondiale.

LA visée pédagogique du livre est claire : faire découvrir et amener à lire les écrivains congolais (RDC) réunis, à travers des entretiens juxtaposés. Ces quatorze écrivains marquants des années postindépendance africaine, mais pas toujours tous bien connus du grand public, ont en commun un trait : ils sont tous des écrivains engagés. Ils ont pour noms, par ordre d’apparition : Pius Ngandu Nkashama, Zamenga Batukezanga, Kama Sywor Kamanda, Charles Djungu Simba, Pie Tshibanda, José Tshisungu wa Tshisungu, Julien Kilanga Musinde, Antoine Tshitungu Kongolo, Bienvenu Sene Mongaba, Joseph Epoka Mwantuali, Mutshipayi K. Cibalabala, Marcel K. Mangwanda, Norbert Mbu-Mputu et Nlandu Mamingi.

Leur engagement est multiforme cependant, car il ne s’exerce pas dans un secteur d’activités unique. Comment en aurait-il été autrement, dans la mesure où, à la base, ces écrivains ont des formations différentes : médecin, enseignant, chercheur, psychologue, linguiste, chimiste, journaliste, historien, etc.

L’autre point qui fait d’eux des membres d’une même famille : l’écriture, naturellement. Aucun d’eux n’est spécialiste d’un genre unique. Ils s’intéressent aussi bien au roman, au théâtre, à la poésie qu’à la nouvelle, au conte, à l’essai. A des degrés divers, bien sûr. On privilégie au besoin les genres dans lesquels on manifeste plus de savoir-faire. Et c’est le cas ici.

L’auteur de ce recueil d’interviews, Lete Apey Esobe, enseignant-chercheur et originaire lui-même de la RDC, justifie sa démarche : « Notre souci majeur (…) était de mettre à la disposition du lecteur, un outil susceptible de l’aider à compléter les données de ses recherches sur les écrivains congolais de l’après-indépendance que nous avons gentiment abordés et qui, avec un cœur plein de joie et enthousiasme, ont accepté volontiers de répondre à notre questionnaire. »

Lete Apey Esobe travaille donc à faire connaître ces grands noms de la littérature congolaise. Et il y réussit, mais pas avec le même succès partout. Là est l’une des faiblesses de son entreprise. Sa sensibilité affleure trop souvent, quand il interviewe certains de ces auteurs. A lui seul, Pius Ngandu Nkashama, par exemple, occupe un peu plus du quart du livre, dans un entretien fleuve qui ne nous édifie pas toujours. A l’opposé, c’est en quatre pages à peine que Marcel K. Mangwanda est « présenté ».

Chacun verra quoi retenir de cette somme d’informations que nous propose l’auteur. Entre le regard souvent original, voire franchement décalé, que ces écrivains portent sur nombre de sujets (politique, économie, relations Nord-Sud, édition, livre, culture, écriture, systèmes scolaires, université, recherche, rapport à l’Autre, etc.), leurs ouvrages, leurs métadiscours sur les ouvrages des écrivains des autres contrées, le choix est vaste.

Et des solutions à certains problèmes rencontrés par des Africains entrepreneurs culturels ne manquent pas. Un exemple. Lete Apey Esobe : « Quelles sont les stratégies que vous pouvez mettre en place pour promouvoir la littérature congolaise dans l’avenir ? » Kama Sywor Kamanda : « Réaliser des documentaires, des portraits, des anthologies sur les écrivains, des ouvrages de référence : livres critiques, historiques, biographiques. Promouvoir la littérature grâce aux festivals, salons du livre, rencontres littéraires, maisons des écrivains, maisons d’édition…»

Un peu comme ce que lui-même, Lete Apey Esobe, a fait, en somme. Initiative à saluer. 


 


RN





Chroniqueur : Rodrigue Ndong